Des scènes d’hôpitaux qui se déroulent quasiment sous nos yeux, des reportages au cœur des soins intensifs, le compteur des décès qui laisse défiler ses chiffres menaçants quotidiennement sur nos écrans, le stress des soignants…
Ce premier mois de confinement : l’heuristique de disponibilité
Au bout de ce premier mois de confinement, nous sommes nombreux à penser que les cas sévères sont trop fréquents… Et pourtant, un nombre très important de personnes guérissent et s’en sortent sans séquelles (le Parisien rapporte 98% de guéris).
Les médias ont créé un début de panique en passant en boucle sur toutes les chaînes de télévision, avec un luxe de détails, des informations sur les méthodes de dépistage et de traitement utilisés par les différents pays, les incertitudes des médecins de terrains, des politiciens et des chercheurs.
Pourquoi ces images contribuent à nourrir notre perception du risque de la maladie ?
Lorsque nous essayons de nous représenter la probabilité qu’un événement arrive, nous rassemblons à toute vitesse des images mentales liées à cet événement, et plus nous en trouvons, plus nous jugeons l’événement susceptible de se produire. C’est ce qu’on nomme l’heuristique de disponibilité : plus les images mentales sont disponibles, plus la probabilité estimée est grande.
Que se passe-t-il si la télévision nous alimente constamment en images consacrées aux cas sévères de coronavirus ?
Nous avons alors, toute une banque d’images disponibles à notre conscience et nous croyons, d’après l’heuristique de disponibilité, que c’est un phénomène très courant. Cette heuristique de disponibilité nous fait juger involontairement comme très élevé, le risque de contracter des symptômes graves de la maladie.
Coronavirus et crash aérien : lequel tue le plus ?
Cette heuristique de disponibilité est flagrante dans un autre exemple, bien connu : il y a davantage de personnes qui ont peur de l’avion que de personnes qui ont peur de la voiture. Pourquoi? Parce que les médias nous ont abreuvé en image de crashs aériens et que ces images nourrissent notre heuristique de disponibilité. Les images de crashs aériens ont rempli nos écrans et faussent notre perception du risque statistique réel. C’est ainsi que l’on en vient à tromper complètement sur la probabilité d’une catastrophe, ce qu’a montré une expérience menée en 1991 par trois chercheurs en psychologie de l’université de Zurich, C. Keller, M. Siegrist et H. Gutsher.
Une surestimation du risque
Dans cette étude, on a distribué à des volontaires des notices d’informations sur les inondations dans la région, et la façon dont ces volontaires percevaient le risque a été étudiée.
Une première version de la notice comportait un descriptif des risques sur les 30 dernières années, l’autre version se concentrant sur une durée d’un an. La première version proposait donc davantage d’images d’inondations, même si le nombre de sinistres par unité de temps était le même.
Cependant, les volontaires exposés à cette notice ont jugé les risques bien supérieurs !
Ils avaient davantage d’images mentales disponibles pour fonder leur estimation. L’heuristique de disponibilité leur faisait donc surestimer le risque.
Le niveau de détail d’un reportage, ou la répétition des images sur un thème donné, alimentent notre cerveau en “exemples” qui peuvent nous faire percevoir un événement comme très probable.
Cela peut prendre de multiples formes à l’écran. Les accumulations de témoignages, par exemple, jouent en ce sens.
Bien s’informer du Coronavirus
Alors … Comment peut on gérer la situation aujourd’hui puisqu’il faut bien s’informer?
Pour commencer, on choisit un seul média pour le faire, et seulement moins de 30 minutes par jour. Privilégiez la presse écrite traditionnelle si possible. Attention, le croisement et la multiplication des informations contradictoires et des fake news ajoutent à l’angoisse.
Des recommandations que donnent également l’Organisation Mondiale de la Santé dans son guide pour préserver sa santé mentale en cas de confinement.
Concentrez vous plutôt sur des informations positives comme les témoignages de personnes qui ont guéri.
OMS
Restons également conscients de nos limites: nous n’avons pour la plupart pas accès aux données médicales et/ou scientifiques, peut être partiellement. A ce sujet, mal fouiller dans les données et les divers articles est le meilleur moyen de générer encore des incertitudes, stress et questionnements sans réponses.
En revanche, soyons rassurés, nous avons la compétence pour nous protéger et protéger les autres et en cela, nous pouvons même exceller.
Je vous souhaite à tous un très bon deuxième mois de confinement !