Cet échange que j’ai eu récemment avec un de mes meilleurs amis m’a replongée dans le souvenir de certains travaux en psychologie sociale sur la séduction. Ces études ont montré que ressentir des émotions intenses pouvait être impliqué dans les mécanismes de séduction. Un contexte bien chargé émotionnellement aurait donc tendance à rapprocher les coeurs!
Est ce une bonne stratégie de mettre une personne dans une situation où elle ressent des émotions fortes pour la séduire ?
Cindy Meston et Penny Frolich, de l’Université du Texas à Austin, ont testé l’efficacité de cette approche dans une fête foraine et ont interrogé des personnes qui sortaient d’un tour de montagnes russes, et d’autres qui étaient sur le point d’y entrer. A cette occasion, les expérimentateurs ont demandé aux participants d’évaluer l’attrait physique d’une personne sur une photo ainsi que d’exprimer leur désir (ou non) de rencontrer cette personne.
Les chercheurs ont observé que les personnes qui sortaient du manège évaluaient la personne plus attirante et avaient davantage envie de la rencontrer que les personnes qui n’avaient pas encore fait l’attraction.
Pourquoi le fait de ressentir des émotions fortes influencerait la perception qu’on a d’une personne?
Dans cette expérience, on observe que les gens qui sortent du manège à sensation assimilent leurs émotions intenses à du désir pour la personne sur la photo alors qu’elles sont dues au contexte.
L’environnement va alors influencer le degré d’attirance à l’égard d’une personne inconnue. En effet, ces résultats s’expliqueraient par un phénomène en psychologie qu’on appelle l’erreur d’attribution déjà mis en évidence dans les années 1970 par les psychologues Donald Dutton et Arthur Aron.
Pour étudier ce phénomène, les chercheurs avaient recruté un groupe d’hommes de 18 à 35 ans non accompagnés d’une femme. Ils devaient traverser soit des ponts avec des planches de bois suspendues au dessus d’un canyon, soit un pont stable et rassurant. A la fin de la traversée du pont, le participant était abordé par un expérimentateur (un jeune homme ou une jeune femme) qui prétextait effectuer une enquête sur l’expression artistique. Il s’agissait de remplir un questionnaire impliquant des items permettant d’évaluer à l’instant l’imaginaire sexuel, puis l’expérimentateur/trice proposait au participant de fournir des détails sur l’étude et donnait son numéro de téléphone pour être rappelé.
Les résultats ont montré que la condition “pont suspendu au dessus du vide” suscitait un imaginaire sexuel plus fort que la condition “pont stable”. De plus, les participants ont rappelé cinq fois plus, lorsque la jeune femme menait l’enquête dans la condition “pont suspendu au dessus du vide”.
C’est donc bien le fait d’avoir vécu d’abord une émotion forte et ensuite rencontré une femme qui a incité les hommes à rappeler.
Il semble donc que vivre des émotions fortes permettrait de juger une personne plus attirante.
Donc, cher Nico, ton intuition était bonne parce que si on se base sur ces recherches, on peut généraliser sur le fait que les activités à sensation constituent un cadre propice pour susciter davantage de désir chez ta partenaire (bien qu’à ce stade de la relation, tu connais déjà sa réponse!).
Et si vous n’avez pas de pont suspendu ou de montagnes russes sous la main ?
Vous pouvez toujours inviter votre conquête au cinéma voir le dernier film d’horreur ou lui suggérer une balade en moto, la stimulation émotionnelle provoquée par le film ou la balade en moto devrait engendrer une erreur d’attribution en votre faveur !
Mais plus sérieusement, je pense qu’il vaut peut-être mieux éviter de prendre des décisions romantiques importantes sur des ponts effrayants ou dans des manèges à sensation, surtout, si nous souhaitons que nos relations soient basées sur (au moins) une véritable attirance. De ce fait, vous pouvez oublier l’idée du parc d’attraction pour un premier rendez-vous. A bon entendeur…
Références
Dutton, D. G., & Aron, A. P. (1974). Some evidence for heightened sexual attraction under conditions of high anxiety. Journal of Personality and Social Psychology, 30, 510–517.
Meston C.M., & Frohlich P.F. (2003). Love at first fright: partner salience moderates roller-coaster-induced excitation transfer. Arch Sex Behav. 32(6):537-44.