Ahhh l’esprit de Noël… qui réchauffe les cœurs, allume des étincelles dans les yeux des enfants, cette impression subtile que plane dans l’air, patience et joie. Chacun est plus bienveillant, à l’écoute et généreux. Ce temps où les contrariétés se mettent en pause et où nos âmes d’enfants se réveillent. Enfin…. Trouver l’esprit de Noël à l’instar des séries de Noël, ce n’est pas si évident!
40% des Français appréhendent de se fâcher avec leur famille lors des fêtes
En effet, selon un sondage mené par l’Ipsos en 2014, 40% des Français appréhendent de se fâcher avec leur famille lors des fêtes de fin d’année.
Pourquoi les réunions de famille virent elles parfois (souvent ?) au cauchemar ?
Comment définir la famille ?
L’apport de l’approche systémique permet de définir la famille comme un système dont les éléments (ou membres) interdépendants évoluent en fonction d’un objectif commun, à savoir, maintenir la vie du système (ou de la famille)
Alors, au fil du temps, au gré des résolutions (ou non) des crises (naissance, adolescence, université, mariage, divorce, décès), les membres de la famille se sont plus ou moins éloignés, ont souvent construit d’autres systèmes familiaux loin de la première cellule, et ce beau petit monde ensemble joue ou rejoue, thématiques anciennes et nouvelles, à l’occasion du repas de Noël: les problèmes de couple, la scolarité des enfants, l’agressivité, la jalousie entre frères et sœur, etc… Le tout arrosé d’un (ou plusieurs) verres de champagne! Les ingrédients essentiels sont bien présents pour semer la zizanie…
L’injonction paradoxale: Attention, climat sensible: sois calme et serein !
Il semblerait également que les attentes des participants à la réunion de famille constituent une pression supplémentaire qui va générer des tensions entre les membres.
On s’attend à ce que ça se passe mal avec certains membres de la famille, donc il faut tout faire pour que cela se passe bien, resister, et surtout éviter certains sujets avec certaines personnes”.
Avec de telles anticipations, qui nourrissent le stress ambiant, les objectifs espérés d’entretenir un climat apaisant sont irréalistes et irréalisables.
Ainsi, la réunion de famille finit par épouser le schéma craint à priori par chacun et se transforme en un cocktail explosif de disputes et de conflits.
Faut il éviter d’aborder certains sujets lors du repas de Noël ?
Jill Suitor, professeure de sociologie montre à travers une étude sur les différences au sein de la famille que les conflits ont davantage de chance de survenir lorsque des sujets tels que la religion et la politique sont abordés à table.
Dans sa recherche, elle constate également que les désaccords sur les choix des partenaires sont un point de conflit important entre les parents et les enfants qui conduisent à des contacts moins fréquents au quotidien. De plus, la qualité de la relation avec la belle-famille affecte la qualité de la relation des parents avec l’enfant adulte.
L’éloignement affectif et physique entretenu tout au long de l’année entre parents, enfants et belle famille mute à Noël en proximité physique entre toutes ces personnes qui ont eu du temps pour mûrir et nourrir leurs griefs, tout est là pour que les discussions virent en règlement de compte.
Je pense qu’il faut tout de même avoir conscience qu’il est presque illusoire d’éviter à table les sujets qui fâchent lorsqu’on se retrouve.
Essayer de les éviter c’est d’abord faire grandir l’anxiété de ne surtout pas en parler, et si l’initiative d’aborder le thème coupable, est prise par un autre membre de la famille… La mise en échec de ses propres efforts peut s’avérer encore plus coûteuse et participer à la guerre des familles.
Les sentiments de favoritisme et de défavoritisme peuvent se réactiver au moment de l’échange des cadeaux. Les membres de la famille peuvent avoir tendance à comparer les cadeaux qu’ils reçoivent (ou que les petits enfants reçoivent) et évaluer à partir de cela la position qu’ils ont au sein de la famille. Cela peut créer des tension importantes, pour peu qu’il y ait eu véritablement du favoritisme de la part des parents lorsque la fraterie vivait sous le même toit, ou bien des croyances négatives type “je suis nul” “je ne mérite pas d’être aimé” “je ne motive aucune admiration”.
La comparaison sociale
Ce mécanisme psychologique de comparaison a été théorisée en 1954 par le psychologue social Leon Festinger. Ce phénomène porte le nom de comparaison sociale.
Nous l’utilisons sans cesse pour mieux nous connaître et nous positionner face aux autres, et ceci dans l’objectif de préserver, alimenter ou améliorer l’estime de soi. La comparaison sociale permet à tout un chacun de se situer par rapport aux autres et ainsi d’obtenir la satisfaction rassurante d’être aussi bien voire mieux que les autres.
D’après les recherches de Jill Suitor, les observations au sein de la famille montrent qu’il est très fréquent que les frères et sœurs utilisent l’instrument de comparaison sociale. Ils se jaugent entre eux, et se demandent qui est l’enfant favori des parents. Les résultats obtenus dans son étude font remarquer que les enfants se trompent majoritairement (plus d’une fois sur deux) sur les intentions des parents, lorsqu’ils doivent évaluer qui est l’enfant que les parents préfèrent. Ces évaluations sont souvent opposées à ce que les mères disent elles-mêmes de leurs sentiments à l’égard de leurs enfants.
En outre, ces impressions sont remarquablement imperméables aux comportements et aux intentions que les mères ont, et mêmes si ces dernières font tout leur possible pour ne pas montrer de différence vis à vis de leurs enfants.
Quelle potion magique pour survivre au repas de Noël et plus généralement aux réunions de famille ?
La première chose à faire: n’anticipez pas les tensions à venir; elles sont presque inévitables et malgré tout, vous avez quand même choisi de vous réunir en famille. Se préparer mentalement au repas de Noël, c’est aussi se projeter dans ces liens familiaux qui sont souvent difficiles mais qui peuvent s’avérer tout aussi positifs et essentiels. C’est repérer ce qu’ils nous procurent et nous ont procuré d’agréables voire de soutenant et ressourçant. Établir une liste de ces éléments et souvenirs heureux peut être une stratégie qui rendra les conflits moins douloureux à vivre et les minimisera.
Je ne sais rien de plus fou, et cependant de plus vulgaire, que de vouloir avoir raison.
Paul Valéry
La seconde chose que je vous suggère, est de vous exercer à automatiser la pensée que l’autre en face de vous a le droit de s’exprimer librement. En partant de ce postulat, si vous respectez la liberté d’expression de l’autre à 100%, vous pouvez accepter qu’il puisse juger vos comportements négativement, qu’il puisse dire des choses à priori injustes sans que cela vous affecte directement puisqu’il a le droit de le faire.
Plutôt que vous justifier pour tenter de lui inspirer de revoir son opinion sur vous, ou sur le débat Melenchon-Zemmour ou la politique de vaccination au COVID.
La troisième chose serait que si vous vous trouvez en privé avec un membre de votre proche famille et qu’il vous semble utile de régler certaines choses du passé ou lui demander de revoir son comportement envers vous. Il serait essentiel de le faire sur les bases d’une communication non violente ( voir la communication non violente au quotidien -Marshall Rosenberg-).
Demander plutôt que reprocher
Ne reprochez pas un comportement, c’est inutile pour obtenir ce dont vous avez besoin, l’autre aura tous les arguments du monde pour vous prouver que son intention était bonne.
Plutôt que reprocher quelque chose, demandez à l’autre précisément ce dont vous avez besoin pour aller mieux en le projetant sur un moment où il a réussi à avoir le comportement adéquat qui vous a fait du bien.
Exemple un peu trivial : Maman, je sais que tu aimerais que je réussisse professionnellement, lorsque tu me dis que j’échoue à tous mes concours, je perds confiance. J’ai besoin de retrouver cette confiance en moi. “En 2016, à l’occasion du concours de X, tu as été tellement rassurante, tu m’as vraiment comprise, tu as su me rappeler que je peux réussir et ça m’a fait du bien, j’ai pu rapidement me remotiver et me reprendre en main, pourrais tu s’il te plaît m’aider comme tu l’as fait la dernière fois?”
En étant précis et concis dans vos demandes sans envisager de mettre en relief le manquement chez l’autre, vous avez bien plus de chance que l’autre s’allie à vous, et respecte votre besoin.
Et voilà, vous avez maintenant quelques astuces pour bien vivre les fêtes en famille et minimiser l’impact émotionnel que peuvent avoir sur vous les moments quasi inévitables de tension avec vos proches.
JOYEUX NOËL ET BONNES FETES DE FIN D’ANNÉE